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Capitaine d’équipe à la Coupe Ryder, un boulot périlleux

22 AUG 2018

  

Par Peter Mumford

 

Être nommé capitaine d’équipe pour la Coupe Ryder, ce devrait être un grand honneur généralement dévolu à un golfeur qui a su se montrer calme et réfléchi sous haute pression, qui possède un pedigree riche en victoires et qui s’est déjà illustré à ce tournoi international. Il appert toutefois que cette tâche s’accompagne de son propre lot de haute pression.

 

Les capitaines sont choisis deux ans avant la tenue des matchs où ils mèneront leur équipe, et dès leur nomination, ces pauvres types sont immédiatement bombardés de questions idiotes par les médias, comme par exemple leur choix de substitut si tel ou tel golfeur ne mérite pas sa place au sein de l’équipe grâce à ses points cumulatifs. Qui plus est, on leur demande d’expier les défaites de leurs prédécesseurs et de promettre que leur équipe triomphera. C’est sans doute un grand soulagement pour eux d’arriver sur le terrain pour la joute elle-même.

 

Mais au-delà de cette pression médiatique, le poste de capitaine à la Coupe Ryder est plutôt facile. Le leader n’a que trois décisions importantes à prendre: ajouter quelques joueurs à son équipe pour la compléter, brasser les cartes d’alignement chaque matin du tournoi et choisir les polos d’équipe.

 

Des polos de golf… quel dilemme!

 

Les commanditaires de chaque équipe sont choisis longtemps d’avance par les comités de la Coupe Ryder, ce qui empêche les capitaines de se lever un matin avec l’idée de débloquer complètement en optant pour des chandails bigarrés et des pantalons trop voyants. Ses choix se limitent à quelques motifs et une palette de couleurs.

 

Pour l’équipe des États-Unis, pas de problème: on combine le rouge, le blanc et le bleu pour les trois jours, puis on ajoute quelques étoiles et rayures pour donner le ton patriotique. Et si Tiger Woods fait partie de l’équipe, on s’assure que le rouge domine le jour de la finale, dimanche. Ce qui devrait faire plaisir au Capitaine America Patrick Reed, aussi.

 

Le capitaine européen est confronté à des choix plus difficiles. À l’origine, quand l’équipe se limitait à la Grande-Bretagne et à l’Irlande, le rouge, le blanc et le bleu de l’Union Jack s’ornait de quelques touches d’orange et de vert du drapeau irlandais pour maintenir la paix entre les coéquipiers. Maintenant que toute l’Europe en fait partie, le jaune, l’or et diverses teintes de vert, de bleu et de rouge s’incorporent au mélange, avec le noir de l’Allemagne et de la Belgique. Le blanc est toujours aussi immaculé, mais les Européens le réservent à leurs pantalons.

 

Thomas Bjorn peut probablement choisir la couleur qu’il veut pour son polo, tant que ce n’est pas brun rougeâtre, car aucun golfeur de Lettonie n’est dans son équipe.

 

Étant donné que le tournoi de 2018 se joue en France, on verra sans doute le tricolore s’afficher, soit bleu, blanc et rouge, encore une fois.

 

Mais le choix de tenue vestimentaire n’échappe pas à la controverse. À preuve ces deux épisodes notoires qui illustrent les risques de désastre.

 

En 2010, le capitaine des États-Unis Corey Pavin a conduit son équipe au Celtic Manor, au Pays de Galles, contrée où il pleut toujours en octobre, et beaucoup! C’est la société Sun Mountain qui avait remporté les enchères de commandite pour fournir les imperméables à l’équipe américaine, cette année-là, et ce sont Pavin et son épouse Lisa qui devaient choisir le design. La mainmise des femmes sur le choix des tenues d’équipe est une vieille tradition américaine qui remonte à l’époque où Martha Washington a conçu l’uniforme de son général de mari pour sa traversée du fleuve Delaware, avant les premiers matchs des Américains contre les Britanniques, aussi appelés la Révolution américaine.

 

Bref, quand on a annoncé que Pavin serait capitaine de l’Équipe des États-Unis, deux ans avant le fiasco gallois, le golfeur a déclaré que Lisa participerait au choix des uniformes.

 

«Lisa dispose d’un budget illimité pour sa garde-robe, à la maison, et je vous préviens dès maintenant, attendez-vous à n’importe quoi», a prévenu Pavin.

 

Qu’est-ce qui pourrait bien se passer qui n’aille pas?

 

Commençons par le design.

 

Il y en a qui ont dit que les vêtements de pluie bleus avaient l’air de tenues de réchauffement pour une équipe de basketball collégial, avec leurs bandes blanches ajoutées aux manches et aux jambes de pantalon, et le nom du joueur affiché dans le dos. Si les golfeurs étaient gênés, ils n’en ont rien laissé paraître et, si ça n’avait été qu’un simple accroc à la mode, on aurait pu se contenter d’en rire, à terme.

 

Mais les vêtements ne fonctionnaient pas. Les fortes pluies galloises ont traversé les impers et les matchs du vendredi sont devenus un véritable calvaire pour les États-Uniens. Seule consolation: le terrain était tellement détrempé qu’il a fallu remettre au lendemain les quatuors de l’après-midi. Durant la pause, au grand amusement des Européens, Pavin a entraîné son équipe à la boutique de golf et acheté des vêtements de pluie fabriqués par le fournisseur de l’équipe adverse. Gênant… Les États-Unis n’ont pas remporté la Coupe Ryder cette année-là.

 

Mais le choix vestimentaire le plus étrange est celui du capitaine de l’équipe américaine de 1999, Ben Crenshaw. Lui et sa femme Julie (évidemment) avaient sélectionné un polo brun rougeâtre à col et ourlets beiges, orné d’innombrables petites photos en noir et blanc illustrant les anciens triomphes américains à la Coupe Ryder. De dire que ces chemises étaient laides serait bien en dessous de la vérité.

 

Les États-Uniens tiraient de l’arrière 10 à 6 derrière les Européens à l’amorce des matchs solos du dimanche à Brookline, et l’on se souvient encore du sermon inspirant de Crenshaw, le samedi soir, où il n’a pas dit grand-chose, si ce n’est: «J’ai confiance pour demain.»

 

Les Américains remportèrent les six premiers affrontements, ce dimanche-là, et finirent par remporter la bataille de Brookline grâce au long coup lobé de Justin Leonard qui aboutit dans la coupe du 17e trou et défit Jose Maria Olazabal en ce qui s’avéra la plus formidable remontée d’équipe de l’histoire de la Coupe Ryder. La célébration de la victoire dépassa toutes les bornes lorsque l’équipe au grand complet se précipita sur Leonard au milieu du 17e vert pour le féliciter, alors qu’Olazabal pouvait encore faire l’égalité.

 

Les images de ces golfeurs américains en liesse, accoutrés de ces tenues horribles, entacheront à jamais l’histoire de la Coupe Ryder. Tiger Woods assure qu’il a brûlé les vêtements qu’il portait ce jour-là, mais si vous êtes un maniaque, on vend aux enchères, ces jours-ci, un polo authentique de la Coupe Ryder 1999 signé par tous les joueurs. La mise est autour de 3 500$ actuellement.

 

Souhaitons que ni Jim Furyk ni Thomas Bjorn ne sera aussi audacieux dans son choix vestimentaire cette année.

 

Pour ce qui est des autres choix que devront faire les capitaines dans quelques semaines, ils ne posent aucun problème. Woods, Schauffele, Kuchar et Finau chez les Américains. Désolé, Phil. Poulter, Stenson, Knox et Pieters pour l’Europe. Désolé, Sergio.

 

Pas difficile. Les choix de polos sont bien plus ardus!

 

Peter Mumford est rédacteur en chef de Fairways Magazine. Suivez-le sur Twitter @FairwaysMag.