Signez donc votre carte
13 NOV 2019
Une carte de pointage sans signature, c’est comme un chèque qu’on n’a pas signé, mais il y en a, dans les médias golfiques, qui n’y voient qu’une petite erreur d’écriture, comme s’il y avait une zone grise.
Par Peter Mumford
Je vous demande pardon de m’emporter un peu, mais certaines nouvelles de golf qui ont fait la manchette m’ont choqué.
Nous sommes à cette période de l’année où le golf universitaire bat son plein aux États-Unis et où les épreuves de qualification menant aux circuits professionnels détermineront les emplois pour 2020. Les golfeurs et golfeuses ne sont pas encore au niveau de la PGA ou de la LPGA, mais ils représentent l’avenir du golf et sont très prometteurs.
Et pourtant, presque chaque jour, quelque infraction aux Règles du golf éclipse un tournoi ou un vainqueur qui mérite à juste titre les feux des projecteurs. Mais ce n’est pas ce qui me fâche le plus. On enfreint les règles tout le temps – parfois par inadvertance, parfois intentionnellement – mais les pénalités sont bien énoncées. Les joueurs, surtout aux niveaux universitaire et professionnel, les connaissent et les comprennent. Ou du moins, ils devraient.
Et les gens qui écrivent à propos du golf devraient les connaître, eux aussi.
La semaine dernière, à un tournoi de qualification du circuit Korn Ferry, le golfeur costaricain Luis Gagne a été disqualifié pour avoir remis une carte de scores non signée. Ça arrive. Une seule fois dans une vie, ordinairement, mais ça arrive.
On ne connaît pas les circonstances de l’infraction de Gagne. Il a peut-être oublié, tout simplement. Son partenaire de jeu était peut-être en train de s’engueuler avec les officiels dans la tente des scores, lançant des bouteilles d’eau et démolissant le mobilier. On n’a pas besoin de ce genre de distraction quand on est en train de vérifier sa carte de pointage et peut-être que Gagne voulait seulement se tirer de là avant de recevoir une chaise par la figure. Le fait est qu’il n’a pas signé sa carte et la pénalité pour cette infraction, c’est la disqualification.
Certains médias en ont fait une simple erreur d’écriture, un oubli administratif. Ils invoquent le fait que le score était inscrit sur le grand tableau d’affichage et que personne ne remettait les chiffres en question; par conséquent, le score devrait être officiel. Qu’importe si la carte est signée ou pas?
Ce qui importe, c’est ceci: personne d’autre que le golfeur lui-même ne connaît vraiment son propre score. Sa signature indique qu’il a vérifié les chiffres. Il dit ainsi: «Voilà, c’est exact, c’est ce que j’ai joué. Tout est là en noir sur blanc. Même ce quatre sur le 8e trou où j’ai effleuré ma balle sans que personne le voie. Et ma signature est là pour en attester.»
On ne cesse de nous dire que le golf est un jeu d’honneur et d’intégrité. La carte signée en témoigne. Ce n’est pas un contrat dont un avocat pourrait dire qu’il est nul et non avenu parce que vous ne l’avez pas signé. C’est un accord entre vous-même et la vérité.
Il n’y a pas de zone grise permettant de dire que les arguments sont aussi valables d’un côté comme de l’autre. Essayez de dire au commis de banque que le chèque que vous voulez encaisser est bon, mëme s’il n’est pas signé: «Ouais, c’est juste une erreur d’écriture. Donnez-moi l’argent, s’il vous plaît.»
D’autres commentateurs des médias estiment que cela devrait être la responsabilité des officiels du pointage. Ils n’ont que deux tâches à accomplir: additionner les chiffres et vérifier si les joueurs ont signé leur carte. Ça semble assez simple.
Cependant, la table de compilation des scores n’est pas toujours une roulotte tranquille derrière le 18e vert. C’est parfois un recoin de la salle à manger où les joueurs, leurs épouses et enfants ainsi que leurs cadets font grimper les décibels au niveau d’un concert rock et où règne la plus grande confusion. Ou ça se trouve sous une bâche dressée entre le 9e et le 18e vert, où il y a des golfeurs qui clôturent leur ronde des deux côtés tandis que la pluie crépite au-dessus de votre tête et fait des flaques au sol, alors que les cadets et les joueurs essaient de se mettre à l’abri au plus vite tout en remettant leur carte.
Peu importe, il incombe toujours au golfeur de s’assurer qu’il a bien signé sa carte.
J’ai dit plus haut que le fait de ne PAS signer sa carte de pointage, c’est le genre de chose qu’on ne fait qu’une seule fois dans une vie. Pas dans le sens d’une liste des choses à faire absolument, plutôt dans le sens d’une leçon apprise pour de bon.
Il y a plusieurs années, je participais au championnat de mon club et je relaxais avec mes partenaires de jeu après la première ronde. Un des jeunes adjoints au pro du club s’est approché de notre table et m’a dit: «Excusez-moi, M. Mumford, mais vous avez oublié de signer votre carte de scores.»
Comme il m’arrive souvent, j’ai répondu du tac au tac, de façon plutôt désinvolte: «Quelle différence ça fait?»
Imperturbable, le professionnel adjoint m’a répondu: «La différence, c’est si vous jouez demain ou pas.»
Je n’ai plus jamais oublié de signer ma carte de pointage, jamais.
Peter Mumford est rédacteur en chef de Fairways Magazine. Suivez-le sur Twitter @FairwaysMag.